Comment est apparue la vie sur Terre ? A partir du moment où l’on n’affirme plus que la vie terrestre a été créée par une divinité, mais est apparue spontanément, probablement dans des mers de très faible profondeur, il devient nécessaire pour la science de préciser les raisons de cette apparition. Depuis plusieurs décennies, les hypothèses n’ont pas manqué. Aucune à ce jour n’a été vérifiée. Ceci tient sans doute à ce que la définition de la vie, ou plus précisément de la matière vivante, n’est pas encore suffisamment précise. On ne trouve que ce que l’on cherche.
Rappelons que dans une lettre adressée à son ami, le botaniste et explorateur britannique Joseph Dalton Hooker, Darwin avait envisagé en 1871 un lieu et un scénario possible pour l’origine du vivant sur la Terre : « Quelque petite mare chaude, en présence de toutes sortes de sels d’ammoniac et d’acide phosphorique, de lumière, de chaleur, d’électricité, etc. », où « un composé de protéine fut chimiquement formé, prêt à subir des changements encore plus complexes ».
Aujourd’hui , une équipe de chercheurs menée par Elisa Biondi et Steven Benner, tous deux membres de la Foundation for Applied Molecular Evolution aux États-Unis, vient de publier dans le journal Astrobiology un article référencé ci-dessous concernant une découverte intéressante susceptible d’éclairer l’origine de la vie sur Terre . Elle pourrait aussi intéresser les hypothèses concernant son apparition sur Mars ou dans toute autre planète au delà du système solaire pouvant être qualifiée de « planète habitable » .
On a cependant découvert que l’ARN, qui joue un rôle primordial dans la construction des protéines à partir de l’information issue de l’ADN, pouvait avoir des propriétés autocatalytiques lui permettant de se comporter un peu comme des enzymes vis-à-vis de lui-même. Cette observation a conduit à postuler qu’un « monde d’ARN » a peut-être, à l’aube de la vie, précédé celui de l’ADN et des protéines. Mais un système génétique et des mécanismes pour le métabolisme ne suffisent pas pour la vie. Il faut aussi des compartiments dans lesquels prennent place le métabolisme et le système génétique. En d’autres termes, se pose le problème de l’origine des membranes cellulaires à base de lipides.
L’article, aujourd’hui publié dans Astrobiology et la découverte qu’il expose, apporte peut-être quelques éléments de réponse. Il se base sur des travaux de biochimie et de géochimie utilisant du verre volcanique apparenté aux basaltes. Rappelons que selon une définition que l’on peut trouver fréquemment, un verre volcanique est un matériau amorphe issu du refroidissement rapide d’un magma. Les minéraux n’ayant pas eu le temps ou la possibilité de cristalliser il apparaît donc au microscope comme une pâte amorphe. Un bon exemple est fourni par l’obsidienne qui se forme encore aujourd’hui dans certains volcans.
La genèse de verres volcaniques devait être encore plus importante pendant l’Hadéen sur Terre et le Noachien sur Mars. « Le verre basaltique était partout sur Terre à l’époque », selon Stephen Mojzsis dans un communiqué de la Foundation for Applied Molecular Evolution. Spécialisé en géoscience, le chercheur ajoute que « pendant plusieurs centaines de millions d’années après la formation de la Lune, des impacts fréquents couplés à un volcanisme abondant sur la jeune planète ont formé de la lave basaltique en fusion, la source du verre de basalte ». Il devait en être de même sur Mars. Celle-ci a conservé dans ses couches géologiques beaucoup de ces basaltes et donc des verres qu’ils peuvent former, datant de plus de 3 milliards d’années.
Référence
Catalytic Synthesis of Polyribonucleic Acid on Prebiotic Rock Glasses
8 Jun 2022 https://doi.org/10.1089/ast.2022.0027
- Abstract
Reported here are experiments that show that ribonucleoside triphosphates are converted to polyribonucleic acid when incubated with rock glasses similar to those likely present 4.3–4.4 billion years ago on the Hadean Earth surface, where they were formed by impacts and volcanism. This polyribonucleic acid averages 100–300 nucleotides in length, with a substantial fraction of 3′,-5′-dinucleotide linkages. Chemical analyses, including classical methods that were used to prove the structure of natural RNA, establish a polyribonucleic acid structure for these products. The polyribonucleic acid accumulated and was stable for months, with a synthesis rate of 2 × 10−3 pmoles of triphosphate polymerized each hour per gram of glass (25°C, pH 7.5). These results suggest that polyribonucleotides were available to Hadean environments if triphosphates were. As many proposals are emerging describing how triphosphates might have been made on the Hadean Earth, the process observed here offers an important missing step in models for the prebiotic synthesis of RNA.
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