Rappel
Qu’est ce que Iter
Wikipedia propose au 12/12/2022 une définition du Projet Iter
Le réacteur thermonucléaire expérimental international, ou ITER (acronyme de l’anglais International thermonuclear experimental reactor, également mot latin signifiant « chemin » ou « voie »), est un projet international de réacteur nucléaire de recherche civil à fusion nucléaire de type tokamak, situé à proximité immédiate du centre d’études nucléaires de Cadarache à Saint-Paul-lez-Durance (Bouches-du-Rhône, France). Le projet de recherche s’inscrit dans une démarche à long terme visant à l’industrialisation de la fusion nucléaire. Il associe trente-cinq pays : ceux de l’Union européenne ainsi que l’Inde, le Japon, la Chine, la Russie, la Corée du Sud et les États-Unis, ainsi que la Suisse et le Royaume-Uni en tant qu’États associés à la Communauté européenne de l’énergie atomique.
ITER est le plus grand projet scientifique mondial actuel. Par sa complexité, son ambition et son budget hors-norme, ce projet de haute technologie a été comparé au programme Apollo. Il est sujet à de nombreuses controverses, notamment concernant le montant des subventions sur fonds publics, passées de 5 à 19 milliards d’euros, contributions principalement en nature des parties prenantes sous la forme de composants et de systèmes.
L’entrée en activité et la production du premier plasma est prévue pour 2030.
Selon les promoteurs du projet, la démarche à long terme visant à l’industrialisation de la fusion nucléaire nécessiterait de construire ensuite un second réacteur de recherche, Demo, plus proche d’un réacteur de production, puis PROTO, un réacteur à valeur de prototype industriel, avant la phase industrielle proprement dite.
Article
Aujourd’hui 23/12/22, on apprend que les États-Unis devraient annoncer avoir pour la première fois obtenu un « gain net d’énergie » lors d’une expérience de fusion nucléaire s’étant déroulée au Lawrence Livermore national Laboratory. Il s’agira d’une étape importante pour démontrer la viabilité de cette technologie qui, pour ses promoteurs, pourrait remplacer non seulement le nucléaire de fission mais les énergies renouvelables
« C’est un exploit qui confirme scientifiquement pour la première fois la validité du concept de fusion nucléaire », affirme Ambrogio Fasoli, physicien et directeur du Swiss Plasma Center à l’École polytechnique de Lausanne. Cette technologie consiste à reproduire sur Terre la réaction physique qui entraîne la génération de lumière et d’énergie sur le Soleil en propulsant à très grande vitesse deux atomes, en espérant qu’ils fusionnent.
Le « gain net d’énergie » constitue une étape cruciale dans le chemin parcouru depuis plus de soixante-dix ans par les promoteurs de la fusion nucléaire, qui espèrent la voir devenir le « Saint Graal des énergies renouvelables », avait souligné en avril Don Beyer, représentant démocrate au Congrès lors de la présentation du nouveau plan américain pour développer cette filière.
Cette percée a permis de démontrer qu’il y a « eu davantage d’énergie libérée lors de la fusion nucléaire que celle utilisée par les lasers nécessaires pour susciter la réaction
En l’occurrence, les physiciens du LLNL seraient parvenus à générer 2,5 mégajoules d’énergie alors que les lasers ont projeté seulement 2,1 mégajoules pour susciter la réaction physique,
Le succès, qualifié de « moment historique » par le physicien britannique Arthur Turrell, était attendu depuis longtemps. Cependant, facile à démontrer en théorie, le « gain net d’énergie » était beaucoup plus difficile à atteindre en pratique. Le problème vient essentiellement « des particules des noyaux atomiques qui ne veulent pas se rapprocher sauf si on les chauffe à près de 150 millions de degrés Celsius », selon les termes du physicien Ambrogio Fasoli.
Pour parvenir à de telles températures, il faut utiliser des moyens qui sont eux-mêmes très énergivores. Le LLNL à l’origine de la percée qui devrait être annoncée a eu recours à la fusion nucléaire par confinement inertiel, l’une des deux grandes méthodes pour parvenir à ce résultat. L’autre, appelée fusion par confinement magnétique, est au cœur du projet européen Iter, actuellement développé à Cadarache, dans le sud de la France.
Le procédé utilisé par le LLNL consiste à bombarder une petite capsule de carburant – un mélange de deutérium et de tritium d’une taille d’environ un millimètre – avec des faisceaux laser qui vont la chauffer et la condenser fortement jusqu’à « ce que la ‘coquille’ extérieure de la capsule explose et libère l’énergie », résume Alf-Köhn Seeman, spécialiste de la fusion nucléaire à l’université de Stuttgart. L’annonce officielle devrait permettre de mieux comprendre comment les scientifiques américains sont parvenus à sortir de l’impasse de lasers trop énergivores pour parvenir à ce « gain net d’énergie » historique.
Si « cette prouesse est remarquable d’un point de vue scientifique, elle ne nous rapproche pas beaucoup plus d’un développement commercial de la fusion nucléaire », estime cependant Roger Jaspers, physicien à l’université de technologie d’Eindhoven, associé à plusieurs projets de fusion nucléaire par confinement magnétique.
D’abord, parce qu’il faut déjà savoir de quel gain on parle. « On ne sait pas, par exemple, quelle quantité d’électricité a été utilisée pour charger les lasers », précise Roger Jaspers. Autrement dit, si on prend la consommation d’électricité en compte, il n’y a peut-être même pas eu de « gain net » d’énergie.
Ensuite, pour être commercialement viable, la fusion nucléaire doit pouvoir fournir de l’électricité au réseau en continu. C’est loin d’être le cas avec l’expérience menée au laboratoire Lawrence Livermore. « À l’heure actuelle, il faut plusieurs jours pour ajuster tous les réglages permettant d’atteindre la fusion de la capsule. Une usine devrait réussir cette opération environ dix fois par seconde [pour générer de l’électricité en continu] », souligne Sibylle Günter, la directrice scientifique de l’Institut Max-Planck de physique des plasmas.
Les tenants de la fusion nucléaire par confinement magnétique – une méthode dans laquelle de gros aimants sont utilisés pour maintenir le combustible à une chaleur nécessaire – estiment que leur voie permet de surmonter certains des problèmes inhérents au procédé utilisé en Californie. Mais pour l’heure, ils n’ont pas encore atteint le « gain net d’énergie »… Même si « c’est inévitable dans les années à venir », estime Alf-Köhn Seeman, de l’université de Stuttgart.
Si la réussite du laboratoire Lawrence Livermore était confirmée, le rêve d’une source d’énergie inépuisable, 100 % propre et capable de chauffer des villes entières grâce à de toutes petites capsules de carburant ne deviendra donc pas du jour au lendemain une réalité.