Summary
In vitro cultured stem cells with distinct developmental capacities can contribute to embryonic or extra-embryonic tissues after microinjection into pre-implantation mammalian embryos. However, whether cultured stem cells can independently give rise to entire gastrulating embryo-like structures with embryonic and extra-embryonic compartments, remains unknown. Here we adapt a recently established platform for prolonged ex utero growth of natural embryos, to generate mouse post-gastrulation synthetic whole embryo models (sEmbryos), with both embryonic and extra-embryonic compartments, starting solely from naïve ESCs. This was achieved by co-aggregating non-transduced ESCs, with naïve ESCs transiently expressing Cdx2- and Gata4- to promote their priming towards trophectoderm and primitive endoderm lineages, respectively. sEmbryos adequately accomplish gastrulation, advance through key developmental milestones, and develop organ progenitors within complex extra-embryonic compartments similar to E8.5 stage mouse embryos. Our findings highlight the plastic potential of naïve pluripotent cells to self-organize and functionally reconstitute and model the entire mammalian embryo beyond gastrulation.
https://www.cell.com/cell/fulltext/S0092-8674(22)00981-3
Notre commentaire
Rappelons que le nom d’embryon est donné à l’être humain lors de la première période de son développement. Celle-ci va de la fécondation à la 8e semaine de grossesse. L’embryon passe alors par plusieurs étapes : cellule-œuf ou zygote, morula, blastocyste… jusqu’à la 8e semaine où l’on parle désormais de fœtus.
Le développement de l’embryon de la plupart des animaux multicellulaires ou métazoaires , tels l’humain et la souris, comprend successivement :
- Le clivage ou la segmentation qui correspond aux premières mitoses de l’embryon ;
- La gastrulation qui met en place les deux (ectoderme, endoderme) ou trois (+ mésoderme) feuillets embryonnaires qui vont former les tissus et organes caractéristiques de l’espèce. L’organisation de l’embryon est souvent bouleversée au cours de ce processus qui implique de nombreuses migrations cellulaires ;
- La neurulation et l’organogénèse au cours desquels le système nerveux et les organes se forment à partir des feuillets.
Les embryons des métazoaires peuvent respirer soit par diffusion directe à travers le tégument (exemple : embryons d’amphibiens), soit à l’aide d’une annexe embryonnaire qui joue le rôle de « poumon » ou de « branchie » transitoire (embryons d’amniotes, pour la plupart des mammifères c’est le placenta qui assure ce rôle).
Les embryons des métazoaires peuvent se nourrir à partir des réserves contenues dans leurs cellules et déposés initialement dans l’ovocyte par leur mère (embryons d’arthropodes, d’amphibiens), ou se nourrissent à l’aide d’annexes embryonnaires (embryons d’amniotes, pour la plupart des mammifères c’est le placenta qui assure ce rôle).
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Or on vient d’apprendre ce qui est considéré comme une première mondiale, des biologistes ont développé des modèles d’embryons de souris en laboratoire sans avoir besoin d’ovules fécondés ou d’embryons de souris – en utilisant uniquement des cellules souches (qui peuvent se transformer en n’importe quel autre type de cellule) mises en suspension dans un incubateur spécial avec solution nutritive.
Cette réussite inédite, publiée dans la revue Cell par une équipe dirigée par des chercheurs de l’Institut Weizmann des sciences (Israël), offre un modèle très précis de ce qui se passe au début du développement de l’embryon chez la souris – juste après l’implantation de l’ovule fécondé par un spermatozoïde à la paroi de l’utérus.
Il s’agit d’une étape cruciale : au sein de l’espèce humaine, de nombreuses grossesses s’interrompent à ce stade, sans que l’on sache vraiment pourquoi. Le fait de disposer de modèles va permettre de mieux comprendre ce qui peut mal se passer et, éventuellement, de découvrir dans ce second temps ce que nous pourrions faire pour y remédier.
L’expérience relatée par l’article montre la complexité de ces embryons de synthèse Les cellules souches ont pu s’y différencier et adopter une disposition rappelant ce qui s’observe dans l’embryon à un stade précoce – notamment pour les précurseurs du cœur, du sang, du cerveau et d’autres organes. De plus, une partie des cellules souches, spécifiquement traitées dans ce but, a pu s’orienter vers la formation de cellules de « soutien » comme celles que l’on trouve dans le placenta ou le sac vitellin, nécessaires pour établir et maintenir une grossesse.
Cependant, même si ces modèles constituent un outil de recherche puissant, il est important de comprendre qu’ils ne sont pas des embryons – d’où le terme d’embryoïde employé par certains chercheurs. Ils reproduisent bien certains aspects du développement, mais ni l’architecture cellulaire ni le potentiel de développement des « vrais » embryons dérivés de la fécondation d’ovules par des spermatozoïdes ne peut être actuellement observé . De plus il n’a pas été possible de développer ces modèles au-delà de huit jours, alors qu’une gestation normale chez la souris dure 20 jours.
Demain des « embryons synthétiques » humains ?
Le domaine de la modélisation de l’embryon progresse rapidement, et de nouvelles avancées apparaissent chaque année.
En 2021, plusieurs équipes ont réussi à faire en sorte que des cellules souches pluripotentes humaines s’autoagrègent dans une boîte de Pétri, imitant le « blastocyste » – soit un des premiers stades du développement embryonnaire, à moins de 100 cellules, juste avant le processus complexe de l’implantation.
Les chercheurs qui utilisent ces modèles d’embryons humains, souvent appelés blastoïdes, ont même pu commencer à explorer l’implantation dans une boite de Pétri, mais ce processus est beaucoup plus difficile chez la femme que chez la souris.
La production de modèles d’embryons humains d’une complexité équivalente à celle obtenue avec un modèle de souris reste une proposition lointaine, mais qui doit être envisagée.
Il est important que nous soyons conscients de ce que pourrait vraiment nous dire un tel modèle. Un embryon dit synthétique, cultivé en boîte de Pétri, aura ses limites quant à ce qu’il peut nous apprendre sur le développement humain.
Un autre point à considérer pour ce type particulier de recherche est celui du consentement. Nous devrions réfléchir davantage à la manière dont ce domaine de recherche sera régi, quand il devrait être utilisé et par qui.
Cependant, il est important de reconnaître qu’il existe déjà des lois et des directives internationales sur la recherche sur les cellules souches qui fournissent un cadre pour réglementer ce domaine de recherche.
En Australie, la recherche impliquant des modèles d’embryons de cellules souches humaines nécessiterait une autorisation, similaire à celle requise pour l’utilisation d’embryons humains naturels en vertu de la loi en vigueur depuis 2002. Cependant, contrairement à d’autres juridictions, la loi australienne dicte également la durée pendant laquelle les chercheurs peuvent faire croître des modèles d’embryons humains, une restriction que certains chercheurs souhaiteraient voir modifiée.
En France, les lois de bioéthiques encadrent la recherche autour des embryons.
Indépendamment des changements concernant la manière et le moment où la recherche sur les embryons humains est menée, il est nécessaire que la communauté discute davantage de ce sujet avant qu’une décision ne soit prise.
Il existe une distinction entre certaines technologies telles que le clonage humain à des fins de reproduction, qui sont interdites, et d’autres destinées à faire progresser notre compréhension du développement embryonnaire humain et de ses troubles, qui sont autorisées. Ces travaux sont parfois le seul moyen d’obtenir des informations.
Les chercheurs rappellent également que « cette méthode ouvre de nouvelles perspectives pour l’étude de l’auto-organisation des cellules souches en organes et pourrait, à l’avenir, contribuer à la production de tissus transplantables »
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