Dans le conflit actuel, le soutien de la Chine à la Russie pourrait être décisif. Or il semble très relatif.
Si comme certains l’avaient envisagé, Pékin avait dès les premiers jours annoncé qu’il joignait ses forces à celles de la Russie dans l’offensive menée par cette dernière contre l’Ukraine occidentale et à terme contre l’Occident, ce soutien aurait pu être décisif. Ainsi se serait mis en place une union non seulement militaire et économique, mais également diplomatique engageant deux superpuissances (toutes deux disposant de l’arme atomique) ayant l’ambition de s’imposer à une partie de la terre.
Or à ce jour il n’en est encore rien. Opposé aux sanctions économiques contre la Russie, Pékin n’a pas les moyens de permettre à Moscou de les contourner totalement. L’Empire du milieu n’est pas le premier partenaire économique de Moscou, il pèse pour 15 % de ses exportations et 20 % de ses importations. C’est l’Union européenne (UE) qui détient ce titre avec 37 % des échanges commerciaux de la Russie en 2020, soit 3 fois celui de la Chine.
Malgré tout, les produits phares que la Russie exporte sont justement ceux dont Pékin est importateur, hydrocarbures et céréales. Au premier jour de la guerre, jeudi 24 février, les douanes chinoises ont ;annoncé qu’elles levaient les restrictions aux importations de blé russe mises en place jusque-là pour des raisons phytosanitaires. Une décision que Pékin a, selon les experts, surtout prise pour répondre à ses propres besoins. Mais qui revêt évidemment une portée symbolique considérable.
Par ailleurs, depuis 2019, un gazoduc dit Sila Sibiri (ou Power of Siberia, « force de Sibérie ») relie la Russie à la Chine. Par ce gazoduc et des livraisons de gaz GNL, Moscou a fourni, en 2021, 16,5 milliards de mètres cubes de gaz à la Chine. Un précédent contrat prévoyait la livraison de 38 milliards de mètres cubes par an à l’horizon 2025. Le 4 février, les deux pays ont annoncé l’achat par la Chine de 10 milliards de mètres cubes supplémentaires par an pendant vingt-cinq à trente ans grâce à un nouveau pipeline, Sila Sibiri 2, qui entrerait en activité à partir de 2030.
La Chine voit sans doute d’un bon œil une dépendance accrue de Moscou à son égard. Mais elle n’a aucun intérêt à sacrifier sa relation avec les Occidentaux. Jusqu’en 1992, le produit intérieur brut russe dépassait celui de la Chine. Depuis c’est l’inverse et l’écart ne cesse de croître. Le PIB chinois est près de dix fois supérieur au PIB russe. La Russie ne figure même pas parmi les dix principaux partenaires commerciaux de Pékin.
Selon un expert, « de nombreuses entreprises chinoises souffrent déjà du fait des sanctions. Si elles ne peuvent pas utiliser l’euro ou le dollar dans leurs affaires avec la Russie, elles vont y réfléchir à deux fois avant d’aider les entreprises russes »