Ce n’est pourtant pas Max Planck qui va franchir le pas théorique, mais Einstein, en 1905. Dans son article fondateur sur « la production et la transformation de la lumière » , il considère l’énergie lumineuse comme « constituée d’un nombre fini de quanta d’énergie, chacun ne pouvant être absorbé ou produit que d’un bloc ».Autrement dit, la lumière, connue pour être une onde, est aussi faite de grains. À partir de là, Einstein explique l’effet photo électrique comme un échange d’énergie entre la lumière et les électrons, interprétation qui sera corroborée par les expériences de l’Américain Robert Millikan. Celles-ci montreront notamment que, comme le prédit Einstein, l’énergie de ce grain de lumière est égale à la fréquence de l’onde lumineuse multipliée par une constante, dite de Planck. Einstein en conclut, en 1909, que la nature de la lumière est double : à la fois onde et particule.
Préserver la causalité !
Quatre ans plus tard, le génial physicien salue le modèle d’atome développé par Bohr, qui pose que les électrons circulent sur des orbites autour du noyau. Plus l’orbite est haute, plus l’énergie de l’électron est élevée. Les électrons peuvent changer d’orbite en sautant d’un niveau d’énergie à l’autre, en émettant ou en absorbant des quantités précises d’énergie sous forme d’ondes électromagnétiques. Sauf qu’avec ce modèle, la causalité est mise en défaut. Car, ainsi qu’Ernest Rutherford le demande à Bohr, comment un électron choisit-il tel ou tel palier ? « Il m’apparaît, ajoute le savant anglais, que vous devez faire l’hypothèse que l’électron sait déjà où il va s’arrêter. «
Étonnamment, c’est Einstein lui-même qui, en 1917, calcule la probabilité qu’a un électron de passer d’un palier à l’autre. Travail qui renforce sa gêne à propos de la théorie quantique : « Sa faiblesse réside dans le fait qu’elle ne nous offre pas de connexion plus étroite avec la théorie ondulatoire et laisse au hasard l’instant et la direction des processus élémentaires ; je crois néanmoins que nous sommes sur la bonne voie. «
En 1920, Bohr et Einstein font connaissance et, intellectuellement, c’est le coup de foudre. « J’ai rarement rencontré un homme qui m’ait procuré une telle joie par sa seule présence », écrit Einstein. Cependant, les deux hommes s’opposent sur un point : la causalité.
Alors qu’elle est mise à mal par la « quantique », Einstein refuse pourtant d’y renoncer. « La mécanique quantique force le respect. Mais une voix intérieure me dit que ce n’est pas encore la juste vérité. En tout cas, je suis convaincu que Dieu ne joue pas aux dés. « À elle seule, cette petite phrase résume l’état d’insatisfaction dans lequel le laisse cette nouvelle physique. Car, à partir d’une situation donnée, celle-ci prévoit plusieurs issues possibles : une même cause donne lieu à plusieurs effets… entre lesquels Dieu choisirait d’un coup de dés ? Pour Einstein, cela heurte bien trop sa vision du monde.
