Une étude récente a révèle que l’anesthésie générale met beaucoup plus de temps à agir lorsqu’elle est administrée parallèlement à un médicament stabilisateur de microtubule (composant le cytosquelette), ce qui indiquerait une nature quantique de l’état de conscience. Il a notamment été suggéré que la conscience pourrait découler de la vibration quantique collective des protéines microtubulaires à l’intérieur des neurones. Ces résultats pourraient avoir des implications majeures dans la compréhension des fondements de la conscience.
Les anesthésiques généraux suspendent de manière réversible l’état de conscience ou la mobilité chez les animaux, les plantes et les organismes unicellulaires. Cependant, malgré des décennies d’utilisation en milieu médical, les mécanismes biomoléculaires exacts par lesquels ces composés agissent sur le cerveau demeurent insaisissables. Il a été suggéré que les cibles moléculaires sur lesquelles ces composés agissent sont les clés de leur capacité à induire l’inconscience.
Parmi les cibles proposées figurent les microtubules, principaux composants structurels de toutes les cellules. Il s’agit de réseaux denses de minuscules tubes présents à l’intérieur des cellules et formant le cytosquelette. Dans les neurones, au-delà de leur rôle structurel, ils sont également essentiels au transport intracellulaire et à la plasticité cérébrale. Des études ont également suggéré qu’ils jouent un rôle dans le traitement de l’information, l’encodage de la mémoire ainsi que dans la médiation de l’état de conscience.
Cela a conduit à un débat de plusieurs décennies concernant la base physique de la conscience. Si la plupart des chercheurs estiment qu’elle repose sur la physique classique, une minorité soutient qu’elle pourrait être de nature quantique, régie par la vibration quantique collective des microtubules. Plus précisément, une théorie dite « de la réduction objective orchestrée (Orch OR) », suggère que l’anesthésie bloque directement les effets quantiques nécessaires à la conscience dans les microtubules.
Récemment, une étude a montré que les gaz anesthésiques (comme l’isoflurane) se lient aux microtubules et atténuent leurs effets optiques quantiques, ce qui pourrait être à l’origine de la perte de connaissance. D’autre part, une résistance à l’anesthésie a été observée chez les patients cancéreux ayant reçu une chimiothérapie à base de taxanes, des composés empêchant la dépolymérisation de la protéine composant les microtubules et réduisant la prolifération cellulaire. Ces patients présentaient une pression artérielle inhabituellement élevée pendant la chirurgie et avaient besoin de beaucoup plus d’analgésiques opioïdes que la normale. Ces observations étayent l’hypothèse de l’implication de la liaison aux microtubules dans la perte de conscience induite par anesthésie.
L’équipe de la nouvelle étude a exploré plus avant cette hypothèse en évaluant expérimentalement comment la contribution des microtubules en tant que cibles des anesthésiques volatils pourrait être à la base de la nature quantique de l’état de conscience. « Comme nous ne connaissons pas d’autre moyen (c’est-à-dire classique) par lequel la liaison de l’anesthésique aux microtubules réduirait généralement l’activité cérébrale et provoquerait une perte de connaissance, cette découverte soutient le modèle quantique de la conscience », explique le coauteur principal de l’étude, Michael Wiest, dans un article de blog du Wellesley College (dans le Massachusetts). Les résultats de la recherche sont publiés dans la revue eNeuro.
Microtubules : les bases quantiques de l’état de conscience ?
Afin d’évaluer l’implication des microtubules dans la médiation de la conscience, les chercheurs ont administré de l’épothilone B (epoB), un médicament stabilisateur de microtubule pouvant pénétrer le cerveau, à des rats mâles adultes et en bonne santé. Le groupe traité a reçu une concentration de 0,75 mg/kg d’epoB, tandis que le groupe témoin a reçu un placebo. Ils ont ensuite comparé leur vitesse de perte de connaissance (selon une mesure de Wiest et ses collègues ont constaté que le groupe traité à l’epoB mettait nettement plus de temps à perdre connaissance sous anesthésie que celui non traité. Les rongeurs mettaient en moyenne 69 secondes de plus à entrer dans un état d’inconscience. Cette différence statistique significative ne pourrait pas être expliquée par une tolérance éventuelle due à une exposition répétée à l’isoflurane. Cela suggère ainsi que l’anesthésique agit sur les microtubules pour provoquer une perte de connaissance, étayant ainsi l’hypothèse de la nature quantique de l’état de conscience.
Cette découverte pourrait potentiellement contribuer à élucider certains mystères en neurosciences, tels que la conscience des patients dans le coma et la manière dont certains composés comme le lithium modulent la conscience pour stabiliser l’humeur. Elle pourrait aussi éclairer la manière dont les maladies neurodégénératives affectent la perception et la mémoire, ce qui pourrait déboucher sur de nouvelles stratégies thérapeutiques. En outre, « lorsqu’il sera admis que l’esprit est un phénomène quantique, nous entrerons dans une nouvelle ère de notre compréhension de ce que nous sommes »,conclut l’un frd pzryicipans nclut l’un
Référence
ww.eneuro.org/content/11/8/ENEURO.0291-24.2024
https://www.eneuro.org/content/11/8/ENEURO.0291-24.2024
Sana Khan, Yixiang Huang, Derin Timuçin, Shantelle Bailey, Sophia Lee, Jessica Lopes, Emeline Gaunce, Jasmine Mosberger, Michelle Zhan, Bothina Abdelrahman, Xiran Zeng and Michael C. Wiest
eNeuro 15 August 2024, 11 (8) ENEURO.0291-24.2024; https://doi.org/10.1523/ENEURO.0291-24.2024
Microtubule-Stabilizer Epothilone B Delays Anesthetic-Induced Unconsciousness in Rats
Abstract
Volatile anesthetics are currently believed to cause unconsciousness by acting on one or more molecular targets including neural ion channels, receptors, mitochondria, synaptic proteins, and cytoskeletal proteins. Anesthetic gases including isoflurane bind to cytoskeletal microtubules (MTs) and dampen their quantum optical effects, potentially contributing to causing unconsciousness. This possibility is supported by the finding that taxane chemotherapy consisting of MT-stabilizing drugs reduces the effectiveness of anesthesia during surgery in human cancer patients. In order to experimentally assess the contribution of MTs as functionally relevant targets of volatile anesthetics, we measured latencies to loss of righting reflex (LORR) under 4% isoflurane in male rats injected subcutaneously with vehicle or 0.75 mg/kg of the brain-penetrant MT–stabilizing drug epothilone B (epoB). EpoB-treated rats took an average of 69 s longer to become unconscious as measured by latency to LORR. This was a statistically significant difference corresponding to a standardized mean difference (Cohen’s d) of 1.9, indicating a “large” normalized effect size. The effect could not be accounted for by tolerance from repeated exposure to isoflurane. Our results suggest that binding of the anesthetic gas isoflurane to MTs causes unconsciousness and loss of purposeful behavior in rats (and presumably humans and other animals). This finding is predicted by models that posit consciousness as a property of a quantum physical state of neural MTs.
