24/03/2024 Défense européenne. Implications de la Commission européenne en accord avec les Etats-membres

La question de la défense européenne a pris ces derniers mois une grande actualité, compte tenu des déclarations répétées de certains responsables civils et militaires russes, selon lesquelles il devenait urgent de détruire l’Union européenne, y compris avec des moyens nucléaires tactiques. Vladimir Poutine a manifesté jusqu’ici plus de prudence, mais que fera-t-il à l’avenir ?

Depuis longtemps, c’est-à-dire depuis le Général De Gaulle, la France avait décidé de se donner une politique de défense autonome, avec les moyens militaires et industriels correspondants. Ce n’était pas le cas du reste de l’Europe, notamment de l’Allemagne. Les bases américaines en Europe du Nord devaient lui offrir une protection suffisante.

Mais aujourd’hui Donald Trump laisse entendre qu’il pourrait s’en retirer, afin de préparer de futurs conflits avec la Chine. L’Europe ne doit donc pas attendre d’éventuelles offensives russes, fussent-elle dans un premier temps limitées à la Baltique, pour préparer une politique de défense convenable.

JP Baquiast pour Europesolidaire

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Référence https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/fr/qanda_25_790

La Commission et la haute représentante ont présenté ce jour un livre blanc pour une défense européenne — Préparation à l’horizon 2030.La Commission a également présenté, dans le cadre du plan «ReArm Europe»/Préparation à l’horizon 2030, un train de mesures ambitieux en matière de défense mettant à la disposition des États membres de l’UE des leviers financiers pour stimuler une montée en puissance des investissements dans les capacités de défense.

Tandis que le plan «ReArm Europe»/Préparation à l’horizon 2030 consolide les capacités de défense paneuropéennes grâce à de nouveaux moyens financiers, le livre blanc définit une nouvelle approche de la défense, tout en recensant les besoins d’investissement.

La présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, a fait la déclaration suivante: «L’ère des dividendes de la paix est révolue. L’architecture de sécurité sur laquelle nous nous sommes appuyés ne va plus de soi. L’Europe est prête à monter en puissance. Nous devons investir dans la défense, renforcer nos capacités et adopter une approche proactive en matière de sécurité. Nous prenons des mesures décisives et présentons une feuille de route pour la «Préparation à l’horizon 2030», qui prévoit un accroissement des dépenses en matière de défense et des investissements importants dans les capacités de l’industrie de défense européenne. Nous devons privilégier les achats européens parce que cela implique un renforcement de la base industrielle et technologique de défense européenne. Cela permet de stimuler l’innovation et, en outre, de créer un marché des équipements de défense à l’échelle de l’UE.»

Comme expliqué par la présidente von der Leyen dans les orientations politiques, ces dernières années ont mis en lumière le sous-investissement chronique et un manque de dépenses efficaces dans les capacités militaires de l’Europe. Afin de définir la nouvelle approche et de recenser les besoins d’investissement de l’Europe, la Commission et la haute représentante ont présenté un livre blanc pour une défense européenne — Préparation à l’horizon 2030.

Le livre blanc présente des solutions permettant de combler les lacunes en matière de capacités critiques et de créer une solide base industrielle de défense. Il propose des moyens permettant aux États membres d’investir massivement dans la défense, d’acquérir des systèmes de défense et de renforcer à long terme l’état de préparation de l’industrie européenne de la défense. Ces objectifs sont essentiels à la sécurité de l’Europe.  Celle-ci doit investir dans la sécurité et la défense du continent, tout en continuant à aider l’Ukraine à se défendre contre l’agression russe. Pour permettre de relever efficacement ces défis, le livre blanc met en avant plusieurs grandes lignes d’action:

  • – combler les lacunes en matière de capacités, l’accent étant mis sur les capacités critiques recensées par les États membres;
  • – soutenir l’industrie européenne de la défense par un regroupement de la demande et une augmentation de la passation ècollaborative de marchés publics;
  • – soutenir l’Ukraine par une assistance militaire accrue et une intégration plus poussée des industries européenne et ukrainienne de la défense;
  • – approfondir le marché de la défense à l’échelle de l’UE, notamment en simplifiant la réglementation;
  • – accélérer la transformation de la défense au moyen d’innovations de rupture telles que l’IA et la technologie quantique;
  • – faire en sorte que l’Europe soit mieux préparée aux scénarios les plus pessimistes, en améliorant la mobilité militaire, en constituant des stocks et en renforçant les frontières extérieures, notamment la frontière terrestre avec la Russie et la Biélorussie;
  • – renforcer le partenariat avec des pays du monde entier qui partagent les mêmes valeurs.

Plan «ReArm Europe»/Préparation à l’horizon 2030


Comme l’a déclaré la présidente von der Leyen, le plan «ReArm Europe»/Préparation à l’horizon 2030 permet de dépenser plus de 800 milliards d’euros, articulés autour des piliers suivants:

  1. Mobiliser le recours à des financements publics pour la défense au niveau national

La Commission a invité les États membres à activer la clause dérogatoire nationale du pacte de stabilité et de croissance, qui leur offrira une marge de manœuvre budgétaire supplémentaire pour accroître leurs dépenses en matière de défense, dans le respect des règles budgétaires de l’UE.

Afin que la viabilité budgétaire soit préservée, les États membres devront limiter leurs écarts:

  • à l’augmentation des seules dépenses en matière de défense, en prenant pour point de départ la catégorie statistique «défense» dans la classification des fonctions des administrations publiques (CFAP); 
  • à une augmentation maximale de 1,5 % du PIB par année d’activation de la clause dérogatoire nationale;
  • pour une période de quatre ans. 
  1.  Un nouvel instrument spécifique intitulé «Agir pour la sécurité de l’Europe — SAFE»:

Compte tenu des circonstances exceptionnelles actuelles, la Commission lèvera jusqu’à 150 milliards d’euros sur les marchés de capitaux, en se fondant sur son approche de financement unifiée désormais bien établie, pour aider les États membres de l’UE à augmenter rapidement et sensiblement leurs investissements dans les capacités européennes de défense. Ces financements seront versés sur demande aux États membres intéressés, sur la base de leurs plans nationaux.


Les versements prendront la forme de prêts à longue échéance à prix compétitifs et à la structure attrayante que les États membres bénéficiaires devront rembourser. Ces prêts seront garantis par la marge de manœuvre du budget de l’UE. L’instrument SAFE permettra aux États membres d’amplifier immédiatement et massivement leurs investissements dans le domaine de la défense grâce à des acquisitions conjointes auprès de l’industrie européenne de la défense, en mettant l’accent sur les capacités prioritaires. Cela contribuera à assurer l’interopérabilité et la prévisibilité ainsi qu’à réduire les coûts, en vue d’une solide base industrielle de défense européenne. L’Ukraine et les pays de l’AELE/de l’EEE pourront participer aux acquisitions conjointes et se fournir auprès de leurs industries respectives.

SAFE permettra également aux pays en voie d’adhésion, aux pays candidats, aux candidats potentiels et aux pays ayant signé un partenariat de sécurité et de défense avec l’UE de participer à des acquisitions conjointes et de contribuer au regroupement de la demande. Ils pourront également négocier des accords spécifiques et mutuellement bénéfiques sur la participation de leurs industries respectives aux marchés correspondants.

  1. Mobiliser le groupe BEI et mobiliser des capitaux privés en accélérant le projet d’union de l’épargne et des investissements .Le plan «ReArm Europe»/Préparation à l’horizon 2030 compte également sur le groupe Banque européenne d’investissement pour élargir le champ d’application de ses prêts à des projets en matière de défense et de sécurité, tout en sauvegardant sa capacité de financement. En plus de débloquer des financements considérables, cela aura pour effet d’envoyer un signal positif aux marchés.

Enfin, les investissements publics ne suffiront pas à eux seuls pour répondre aux besoins de l’industrie de la défense en matière d’investissement, depuis les start-ups jusqu’aux entreprises établies. Pour ce faire, la stratégie de l’Union de l’épargne et des investissements, adoptée aujourd’hui par la Commission, permettra de mobiliser plus facilement l’épargne privée vers des marchés de capitaux plus efficients et de canaliser des investissements vers des secteurs critiques de l’économie, tels que la défense, pour ceux qui désirent y investir.

Ces financements seront versés sur demande aux États membres intéressés, sur la base de leurs plans nationaux.


Les versements prendront la forme de prêts à longue échéance à prix compétitifs et à la structure attrayante que les États membres bénéficiaires devront rembourser. Ces prêts seront garantis par la marge de manœuvre du budget de l’UE. L’instrument SAFE permettra aux États membres d’amplifier immédiatement et massivement leurs investissements dans le domaine de la défense grâce à des acquisitions conjointes auprès de l’industrie européenne de la défense, en mettant l’accent sur les capacités prioritaires. Cela contribuera à assurer l’interopérabilité et la prévisibilité ainsi qu’à réduire les coûts, en vue d’une solide base industrielle de défense européenne. L’Ukraine et les pays de l’AELE/de l’EEE pourront participer aux acquisitions conjointes et se fournir auprès de leurs industries respectives.

Questions et réponses sur le plan «ReArm Europe»/«Préparation à l’horizon 2030» 

Qu’est-ce que le plan «ReArm Europe»/«Préparation à l’horizon 2030»? 


Comme l’a annoncé la présidente von der Leyen, le plan «ReArm Europe»/«Préparation à l’horizon 2030» définit des moyens juridiques et financiers concrets pour soutenir les investissements des États membres dans le domaine de la défense. Il s’agit d’un train de mesures ambitieux en matière de défense, qui fournit des leviers financiers dont peuvent immédiatement disposer les États membres de l’UE pour augmenter rapidement et significativement les investissements dans le domaine de la défense et leurs capacités de défense. 

 Quels sont les principaux objectifs du plan «ReArm Europe»/«Préparation à l’horizon 2030»?  

Les piliers du plan «ReArm Europe»/«Préparation à l’horizon 2030» sont conçus pour utiliser tous les leviers immédiatement disponibles pour mobiliser jusqu’à 800 milliards d’euros pour des investissements dans le domaine de la défense, structurés autour des axes suivants: 

  • mobiliser le recours à des financements publics pour la défense au niveau national 
  • nouvel instrument spécifique intitulé «Agir pour la sécurité en Europe — SAFE» pour réaliser des investissements urgents et importants dans le domaine de la défense au moyen d’acquisitions conjointes  
  • mobiliser le groupe BEI et mobiliser des capitaux privés en accélérant le projet d’union de l’épargne et des investissements  

Qu’est-ce que l’initiative «Agir pour la sécurité en Europe — SAFE»? 

Le nouvel instrument financier de l’Union «Agir pour la sécurité en Europe — SAFE» vise à fournir aux États membres jusqu’à 150 milliards d’euros de prêts garantis par le budget de l’UE. Cela aidera les États membres à renforcer leurs capacités de défense au moyen d’acquisitions conjointes. 

Les acquisitions conjointes garantiront l’interopérabilité des forces armées des États membres et la prévisibilité pour l’industrie européenne de la défense, réduiront les coûts et créeront les conditions d’échelle nécessaires pour renforcer la base industrielle de défense européenne. Il s’agit d’un élément clé pour la compétitivité et la préparation de l’industrie de la défense européenne.  

Pourquoi la Commission a-t-elle décidé de recourir à des prêts?  

L’instrument proposé est mis en place pour offrir aux États membres des conditions de financement avantageuses, en tirant parti de la solidité du crédit de l’UE et de son accès au marché. Cela permettra d’apporter une réponse rapide aux besoins actuels en matière de défense. 

Le montant de 150 milliards d’euros pourrait-il être augmenté s’il le fallait?  

À l’instar de tous les autres programmes de soutien financier, le montant maximal des prêts à octroyer aux États membres de l’UE au titre du nouvel instrument sera fixé dans le règlement établissant le nouveau programme.   

Pourquoi les prêts garantis par le budget de l’UE sont-ils plus attrayants que ceux des États membres? 

Le nouvel instrument permettra des prêts à longue échéance (d’une durée maximale de 45 ans avec un délai de grâce de 10 ans pour les remboursements de principal) à prix compétitifs et à la structure attrayante. Ils seront financés par des emprunts de l’UE, ce qui en fera souvent une source de financement des investissements publics plus efficace au regard des coûts que les emprunts nationaux.  

Les prêts bénéficieront de conditions de financement avantageuses, en raison de la notation de crédit élevée dont jouit l’UE, de la liquidité élevée des obligations de l’UE et de la forte demande du marché pour les émissions de l’UE. 

De quelle manière les États membres demanderont-ils des prêts et auront-ils accès aux fonds?  

L’allocation de l’enveloppe de 150 milliards d’euros aux États membres sera fondée sur la demande. Il n’y aura pas de clés de répartition. Les États membres souhaitant recevoir des prêts devront soumettre à la Commission un plan d’investissement pour l’industrie européenne de la défense. Le plan devra inclure une description des activités, des dépenses et des mesures pour lesquelles l’État membre demande un prêt, ainsi que des produits de défense qu’il entend acquérir et, le cas échéant, la description de la participation prévue de l’Ukraine aux activités prévues. 

 La Commission évaluera les plans, qui incluront le montant du prêt et du préfinancement. Le préfinancement garantira que l’aide sera versée dès 2025, couvrant les besoins les plus urgents, et représentera jusqu’à 15 % du prêt. 

De manière générale, les États membres mettront en œuvre les plans au moyen d’acquisitions conjointes qui incluront au moins deux États membres (ou au moins un État membre et l’Ukraine, ou un État membre et un pays de l’AELE/EEE) et concerneront des produits et des prestataires de services établis sur le territoire de l’Union, de l’Ukraine et des pays de l’AELE/EEE. À titre de dérogation transitoire, les États membres peuvent recourir au prêt pour la passation au niveau national de marchés publics pour des capacités prioritaires pour autant qu’ils soient ouverts à d’autres pays et que toutes les mesures nécessaires soient prises pour étendre le bénéfice de ces marchés à d’autres pays. 

Les États membres devront rendre compte tous les six mois de l’état d’avancement de la mise en œuvre, ce qui sera également le moment où ils pourront introduire des demandes de paiement. L’approbation des décaissements est possible jusqu’au 31 décembre 2030.  

Comment le prêt est-il garanti? 

Les obligations de l’UE émises pour financer les prêts seront garanties par la marge de manœuvre du budget de l’UE sous le plafond des ressources propres de 1,4 % du RNB de l’UE. 

La marge de manœuvre est la différence entre le plafond des ressources propres de 1,4 % du RNB de l’UE (c’est-à-dire le montant maximal de ressources que la Commission peut demander aux États membres au cours d’une année donnée) et les recettes nécessaires au financement du budget annuel de l’UE. 

Dans quels délais la Commission peut-elle lever les fonds nécessaires?  

La Commission lèvera ces fonds dans le cadre de son approche unifiée en matière de financement, par l’émission sous une appellation unique d’«obligations de l’UE» et de «titres de créance à court terme de l’UE», et en allouant le produit à des programmes d’action financés par les émissions.  L’approche unifiée en matière de financement donne à la Commission la souplesse nécessaire pour utiliser des financements à court et à long terme sur l’ensemble de la courbe de rendement pour lever les fonds au bon moment. Grâce à ces émissions souveraines, la Commission est en mesure de planifier, d’exécuter et d’assurer la communication à propos de toutes les émissions de manière souple et cohérente.  

Les décaissements au titre du programme dépendront des besoins des États membres, la date du 31 décembre 2030 constituant la date limite d’approbation des derniers décaissements de prêts. Les montants demandés seront donc intégrés sans heurts dans la planification des financements de l’UE, parallèlement aux besoins existants (par exemple, le financement de NextGenerationEU et le soutien à l’Ukraine), ce qui permettra à la Commission de répondre aux besoins de décaissement au fur et à mesure de leur apparition.   

Quels sont les domaines soutenus par les prêts? 

Les prêts peuvent soutenir l’acquisition conjointe de produits de défense, dont des capacités de fabrication et de préparation des infrastructures. L’accent sera mis sur sept domaines d’investissement, conformément aux priorités les plus urgentes en matière de capacités recensées au niveau de l’UE (et en cohérence avec le processus de planification de la défense de l’OTAN): 

  • la défense aérienne et antimissile; 
  • les systèmes d’artillerie; 
  • les missiles et les munitions; 
  • les drones et les systèmes antidrone; 
  • les capacités de soutien stratégique et la protection des infrastructures critiques, y compris en lien avec le domaine spatial; 
  • la mobilité militaire; 
  • le cyber, l’intelligence artificielle et la guerre électronique. 

Comment fonctionnera ce système d’acquisitions conjointes?  

Les prêts permettront la synchronisation budgétaire nécessaire pour passer des commandes conjointes, au moyen d’acquisitions conjointes avec au moins deux pays partenaires. Les États membres sont libres de décider de leur stratégie d’acquisition, qui peut passer par le recours à des agents chargés de la passation de marchés pour leurs projets d’acquisitions.  

L’instrument permettra de renforcer la base industrielle et technologique de défense européenne en garantissant que les commandes soient passées auprès d’entreprises établies et ayant leur siège dans l’Union (et dans certains pays partenaires). En outre, certaines conditions de sécurité spécifiques à la défense doivent être remplies.  

À titre de dérogation transitoire, les États membres peuvent recourir au prêt pour la passation au niveau national de marchés publics pour des capacités prioritaires pour autant qu’ils soient ouverts à d’autres pays et que toutes les mesures nécessaires soient prises pour étendre le bénéfice de ces marchés à d’autres pays. 

Les pays tiers sont-ils autorisés à participer?  

Les pays de l’EEE/AELE et l’Ukraine peuvent participer aux acquisitions conjointes, mais ils ne pourront pas bénéficier des prêts. En outre, les acquisitions conjointes peuvent inclure: les pays en voie d’adhésion, les pays candidats, les candidats potentiels et d’autres pays tiers avec lesquels l’Union est entrée dans un partenariat de sécurité et de défense. 

Existera-t-il une clause «Acheter européen» pour les dépenses? Les États membres pourront-ils utiliser les prêts pour acheter des produits qui ne sont pas fabriqués en Europe? 

Les États membres devront acheter des produits admissibles auprès d’entités établies dans l’UE, l’EEE/AELE et l’Ukraine et y ayant leur siège. 

Pour les consommables de guerre (produits non complexes), les États membres devront veiller à ce que les composants représentant 65 % des coûts du produit final proviennent des pays de l’Union/de l’AELE/EEE/de l’Ukraine. 

Pour les systèmes complexes, la même règle s’appliquera, combinée à la nécessité pour les États membres de veiller à ce que les contractants contrôlent pleinement la conception des équipements de défense. L’objectif est de ne pas créer de nouvelles dépendances pour des systèmes complexes. 

Quel est l’effet du nouvel instrument sur le plan de financement de la Commission pour le reste du premier semestre 2025? Qu’en sera-t-il pour les prochains semestres de financement? 

La planification des financements de la Commission pour le premier semestre de 2025 (90 milliards d’euros de financement à long terme) ne change pas. Au-delà de ce premier semestre 2025, les montants destinés au nouveau programme seront intégrés dans la planification des financements de la Commission pour tous les programmes de l’UE.   

La Commission pourra répondre aux besoins de décaissement pour soutenir le nouveau programme avec la flexibilité offerte par son approche unifiée en matière de financement. Cela limitera les modifications apportées au calendrier envisagé pour l’émission d’obligations en 2025 et en 2026.  

La Commission va-t-elle émettre des obligations «Défense»?   

Non, la Commission n’émettra pas d’obligations portant spécifiquement le label «Défense». Le financement du nouveau programme sera assuré dans le cadre de l’approche de financement unifiée de la Commission, faisant appel à des émissions conventionnelles d’obligations et de titres de créance de l’UE pour soutenir une série de programmes de la manière convenue par les États membres. 

Quelle est la base juridique du nouvel instrument financier de l’UE? 

Ce nouvel instrument de l’UE sera établi en vertu de l’article 122 du TFUE, accordant aux États membres des prêts garantis par le budget de l’UE. 

  • De nombreuses crises vécues au cours du mandat 2019-2024 ont également nécessité des réponses exceptionnelles au titre de l’article 122 du TFUE. Cela a permis à l’Union de réagir rapidement aux problèmes que nous avons rencontrés, comme pour l’achat conjoint de vaccins contre la COVID-19 et de gaz ou pour la composante «prêts» de l’instrument SURE, entre autres. 
  • Ces prêts sont-ils contraires à l’article 41 du traité UE, qui exclut que les «dépenses afférentes à des opérations ayant des implications militaires ou dans le domaine de la défense» soient à la charge du budget de l’Union? 

Le nouvel instrument permettra aux États membres de bénéficier de prêts afin de renforcer l’industrie européenne de la défense. Les prêts ne serviront pas à la mise en œuvre de la politique étrangère et de sécurité commune (PESC) et ne constitueront pas des dépenses découlant d’opérations PESC afférentes à des opérations ayant des implications militaires ou dans le domaine de la défense au sens de l’article 41, paragraphe 2, du traité UE. Les prêts sont accordés sur la base de l’article 122 du TFUE, en tant qu’assistance financière aux États membres qui connaissent une menace de graves difficultés, en raison d’événements exceptionnels liés à la situation géopolitique. 

Il n’y a aucune contradiction entre l’émission d’obligations conventionnelles de l’UE pour financer les dépenses des États membres (y compris les dépenses de défense) et l’émission d’obligations vertes NextGenerationEU spécifiques. Les émetteurs souverains financent divers besoins de dépenses — y compris pour la transition climatique et la défense — par l’intermédiaire de leurs programmes de financement sur les marchés des capitaux.  

Ce qui importe le plus pour les investisseurs, c’est d’avoir la garantie que le produit des obligations vertes NextGenerationEU est exclusivement utilisé à des fins convenues liées à la transition climatique. La Commission peut le faire parce qu’il existe un ensemble sous-jacent de dépenses vertes liées à ces obligations vertes, ce qui lui permet de faire correspondre l’émission d’obligations vertes NextGenerationEU avec des dépenses liquidées liées à la transition climatique. 

Les émissions d’obligations vertes NextGenerationEU continueront conformément aux dépenses vertes déclarées par les États membres dans le cadre du programme NextGenerationEU bien établi. Il s’agira toujours d’inclure les investisseurs recevant une allocation annuelle et d’établir des rapports d’impact sur l’utilisation du produit des obligations vertes NextGenerationEU utilisé pour financer les dépenses liées à la transition climatique dans le cadre des plans nationaux de relance des États membres.  

Clause dérogatoire nationale – Qu’est-ce que la clause dérogatoire nationale et quelle est la base juridique de sa création? 

La clause dérogatoire nationale permet à un État membre de s’écarter de sa trajectoire des dépenses nettes fixée par le Conseil dans le cadre de son plan budgétaire et structurel à moyen terme, en cas de circonstances exceptionnelles échappant au contrôle des autorités de l’État membre et ayant une incidence majeure sur ses finances publiques. Un tel écart ne doit pas mettre en péril la viabilité budgétaire à moyen terme. 

La base juridique pour l’activation de la clause dérogatoire nationale est l’article 26 du règlement relatif au volet préventif, qui fait partie du nouveau cadre de gouvernance économique.  

En quoi la clause dérogatoire nationale diffère-t-elle de la clause dérogatoire générale? 

La clause dérogatoire nationale diffère de la clause dérogatoire générale pour deux raisons principales.  

  1. Premièrement, la clause dérogatoire générale est liée à l’existence d’une grave récession économique dans la zone euro ou dans l’ensemble de l’Union, tandis que la clause dérogatoire nationale vise à faire face à des circonstances exceptionnelles au niveau des États membres.  
  2. Deuxièmement, la clause dérogatoire générale s’applique à l’ensemble de l’Union, tandis que la clause dérogatoire nationale s’applique aux différents États membres sur la base de leur demande.  

En l’espèce, et compte tenu de l’ampleur du défi pour la sécurité européenne, la Commission invite les États membres à coordonner, dans la mesure du possible, leurs demandes de déclenchement de la clause dérogatoire nationale.  

Quelles sont les conditions d’activation de la clause dérogatoire nationale? 

D’une manière générale, pour l’activation de la clause dérogatoire nationale, trois conditions doivent être remplies:  

  1. il existe des circonstances exceptionnelles échappant au contrôle de l’État membre; 
  2. ces circonstances exceptionnelles ont une incidence majeure sur les finances publiques de l’État membre concerné; 
  3. l’écart au titre de la clause dérogatoire nationale ne met pas en péril la viabilité budgétaire à moyen terme. 

La Commission doit évaluer si les trois conditions d’activation de la clause dérogatoire nationale sont remplies pour chaque État membre qui demande son activation. 

Quelle est la procédure d’activation de la clause dérogatoire nationale? 

La procédure débute lorsqu’un État membre demande l’activation de la clause dérogatoire nationale. À ce moment, la Commission évalue si les trois conditions susmentionnées pour l’activation de la clause dérogatoire nationale sont remplies. Sur la base de cette analyse, la Commission recommande au Conseil d’activer de la clause dérogatoire nationale. 

Le Conseil peut alors, dans un délai de quatre semaines à compter de la recommandation de la Commission, adopter une recommandation portant activation de la clause dérogatoire nationale. 

Cette décision est prise à la majorité qualifiée. 

Le Conseil devra également fixer une date limite pour l’activation de la clause dérogatoire nationale. À l’issue de cette période, le Conseil peut décider de prolonger la période d’application de la clause dérogatoire nationale à la demande de l’État membre concerné, pour autant que les circonstances exceptionnelles persistent. Une prolongation aura pour effet de couvrir une période supplémentaire pouvant aller jusqu’à un an, et pourra être accordée plus d’une fois. 

Quand les États membres peuvent-ils activer la clause dérogatoire nationale? 

Dès qu’un État membre demandera l’activation de la clause dérogatoire nationale, ce qu’il est libre de faire à tout moment, la Commission pourra procéder rapidement à l’évaluation décrite plus haut et adresser une recommandation au Conseil.  

Le Conseil se prononcera, dans un délai de quatre semaines à compter de la recommandation de la Commission, sur l’adoption d’une recommandation portant activation de la clause dérogatoire nationale.  

Que veut dire la Commission lorsqu’elle propose d’activer la clause dérogatoire nationale «de manière coordonnée»? 

L’activation de la clause dérogatoire nationale ne peut être déclenchée qu’à la demande d’un État membre. En l’espèce, et compte tenu de l’ampleur des défis auxquels est confrontée l’UE dans son ensemble, la Commission envoie d’emblée un signal aux États membres pour les inviter à activer la clause dérogatoire nationale de manière temporaire, contrôlée, ciblée et coordonnée. 

Compte tenu des défis auxquels l’Europe est confrontée en matière de sécurité, la Commission invite les États membres à recourir à cette possibilité pour augmenter leurs dépenses de défense, renforcer considérablement les capacités de défense de l’UE et accroître les investissements dans l’industrie de la défense, ce qui peut également avoir pour effet de renforcer la compétitivité de l’Europe et stimuler la création d’emplois. 

Une fois les demandes reçues, la Commission évaluera formellement si les trois conditions d’activation de la clause dérogatoire nationale sont remplies pour chaque État membre.  

Comment parvenir à la marge de manœuvre budgétaire de 650 milliards d’euros annoncée par la présidente grâce à l’activation de la clause dérogatoire nationale? 

La marge de manœuvre budgétaire de 650 milliards d’euros est une estimation. L’hypothèse de départ est que tous les États membres de l’UE augmentent progressivement et régulièrement leurs dépenses de défense, pour atteindre le maximum de 1,5 % du PIB d’ici la fin de la période de quatre ans d’activation de la clause dérogatoire nationale. 

Si les États membres augmentent plus rapidement leurs dépenses de défense, le montant total pourrait dépasser les 650 milliards d’euros. Cela peut notamment être le cas pour les États membres ayant recours aux prêts SAFE, en raison de leurs conditions de financement attrayantes. 

Quel est le calendrier pour l’application de la clause dérogatoire nationale? 

La flexibilité prévue au titre de la clause dérogatoire nationale pour les dépenses de défense sera autorisée pour quatre ans à compter de 2025. Les augmentations des dépenses de défense seront calculées par rapport au niveau des dépenses de défense en 2021. 

Les États membres devront se préparer à maintenir un niveau de dépenses structurellement plus élevé à l’issue de cette période de quatre ans, en rééchelonnant progressivement les priorités dans leurs budgets nationaux, afin de préserver la viabilité budgétaire.   

L’augmentation des dépenses de défense dans le cadre de la clause dérogatoire nationale met-elle en péril la soutenabilité de la dette? 

Le plafond de 1,5 % du PIB fixé pour la flexibilité offerte par l’activation de la clause dérogatoire nationale vise à garantir la viabilité budgétaire. Il s’agit de l’une des conditions d’activation de la clause dérogatoire nationale et ce sera un des éléments de l’évaluation réalisée par la Commission des demandes des États membres. L’évaluation sera effectuée pour chaque État membre.  La Commission suivra de près la mise en œuvre de la clause dérogatoire nationale afin de garantir que la viabilité budgétaire à moyen terme est préservée.  

Quelles sont les dépenses considérées comme des dépenses de défense dans le cadre de la clause dérogatoire nationale?  

La flexibilité au titre de la clause dérogatoire nationale couvrira l’augmentation des dépenses totales de défense, en ce compris les dépenses d’investissement et les dépenses courantes. Cela s’appuiera sur l’ensemble de la catégorie statistique de la «Défense» dans la classification des fonctions des pouvoirs publics (CFAP), tout en tenant compte de la définition de l’OTAN.  

La catégorie «Défense» de la CFAP comprend l’achat d’équipements et d’infrastructures militaires, les biens et services à double usage lorsqu’ils sont utilisés par les forces armées, les dépenses relatives au personnel militaire et à sa formation, ainsi que l’aide militaire à l’Ukraine. 

Les dépenses financées par des prêts provenant du nouvel instrument SAFE bénéficieront automatiquement de cette flexibilité.  

Les données de la CFAP sont fondées sur les principes des comptes nationaux et sont donc cohérentes par rapport aux autres données statistiques utilisées dans le cadre de la surveillance économique et budgétaire (notamment le déficit et les dépenses publics).  

Ces données sont recueillies par Eurostat. Les États membres devront également inclure dans leurs rapports à Eurostat les dépenses effectuées au titre de l’instrument SAFE. Eurostat continuera de coopérer avec les autorités statistiques nationales afin de garantir la disponibilité des données nécessaires. 

Les prêts émis au titre de l’instrument SAFE bénéficieront-ils de la clause dérogatoire nationale? Comment vont-ils peser sur les niveaux de la dette publique? 

Les dépenses financées par des prêts provenant du nouvel instrument SAFE bénéficieront automatiquement de cette flexibilité.  

Ces prêts augmenteront le niveau de la dette publique, mais ils permettront généralement de réaliser des économies sur les intérêts en raison de la notation de crédit très favorable dont jouit l’Union par rapport à des situations dans lesquelles les États membres devraient assurer un financement individuel sur les marchés.  

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