Le principe cosmologique est un pilier fondamental de la physique moderne. Il stipule que, à grande échelle, l’univers est homogène et isotrope, c’est-à-dire qu’il présente les mêmes propriétés quelle que soit la direction dans laquelle on l’observe.
Depuis des siècles, l’humanité s’interroge sur la nature de l’univers. Est-il homogène et symétrique, ou présente-t-il des irrégularités cachées ? Une récente étude s’est attaquée à cette question en analysant la direction de rotation des ondes gravitationnelles émises par des fusions de trous noirs. Ses résultats pourraient avoir des implications profondes sur notre compréhension de la physique fondamentale et de la formation de l’univers.
Le principe cosmologique est un pilier fondamental de la physique moderne. Il repose sur l’idée selon laquelle à grande échelle, l’univers est homogène et isotrope, c’est-à-dire qu’il présente les mêmes propriétés quelle que soit la direction dans laquelle on l’observe. Cela implique qu’aucune orientation particulière ne devrait être favorisée, notamment en ce qui concerne la rotation des objets cosmiques.
En d’autres termes, quand on observe les mouvements des galaxies, des étoiles ou des trous noirs, on vois autant de rotations dans le sens des aiguilles d’une montre que dans le sens inverse. On parle de symétrie miroir, une propriété qui garantit qu’il n’existe pas de préférence pour une orientation rotative donnée.
Le deuxième concept est celui de la symétrie. En cosmologie, ce principe indique que tout processus physique reste identique, même si le temps recule, si l’espace est inversé ou si les particules sont remplacées par des antiparticules.
Mais que se passe-t-il si cet univers n’est que le jumeau d’un autre univers qui s’est formé en même temps à ce point et qui s’est développé dans la direction opposée ?
C’est la proposition audacieuse récemment formulée par un groupe de cosmologistes du Perimeter Institute, un institut de physique théorique au Canada dirigée par les professeurs Neil Turok et Latham Boyle, qui répond à cette question.
https://perimeterinstitute.ca/news/a-mirror-universe-might-tell-a-simpler-story-neil-turok
Dans l’anti-univers qu’ils proposent, comme cet anti-univers se déplace dans la direction opposée au nôtre, le temps se déplace également dans la direction opposée. Cette hypothèse, aussi complexe qu’elle puisse paraître, est une tentative de ses auteurs d’expliquer, de manière plus simple et plus économique, plusieurs mystères du cosmos, dont l’énigmatique matière noire.
Deux concepts sont essentiels pour comprendre l’idée d’un anti-univers. Le premier concerne le modèle standard de la physique des particules, la théorie qui décrit les particules fondamentales dont l’univers est constitué et les forces qui les font interagir les unes avec les autres.
Selon le modèle standard, chaque fois qu’une particule de matière apparaît, sa contrepartie d’antimatière, une particule identique avec une charge différente, apparaît également. Cela signifie que la même quantité de matière et d’antimatière aurait a été produite lors du Big Bang.
Le deuxième concept est celui de la symétrie. En cosmologie, ce principe indique que tout processus physique reste le même, si le temps recule, si l’espace est inversé ou si les particules sont remplacées par des antiparticules.
Dans l’étude menée par le Perimeter Institute, les auteurs se sont penchés sur un type de symétrie appelé CPT, les initiales pour charge, parité et temps.
Cette symétrie indique que si la charge, l’image et le temps d’une interaction entre particules sont inversés, l’interaction se comportera de la même manière que précédemment.
Ainsi, la symétrie qui s’applique aux particules, selon les auteurs de l’étude, pourrait également s’appliquer à l’univers dans son ensemble, ouvrant la possibilité d’un univers symétrique.
« L’univers dans son ensemble est symétrique par rapport à la CPT », écrivent les auteurs .
Selon cette hypothèse, le Big Bang est un point de départ d’où proviennent l’univers et son image miroir.
« Nous suggérons que l’univers avant le Big Bang est l »anti-vers de l’univers après le Big Bang », déclarent les auteurs.
« Pour le moment nous pensons que l’anti-vers est une véritable image miroir reflétée dans le temps, avec des particules et des anti-particules échangées », a déclaré Latham Boyle à la BBC.
Selon ce point de vue, l’antivers n’est pas un univers indépendant, mais simplement un reflet de notre univers.
« Nous avons un ‘anti-self’ dans l’autre univers, mais il n’est pas indépendant. Si tu choisis de manger des œufs au petit-déjeuner, ta version de l’anti-verse ne peut pas choisir de manger du bacon au petit-déjeuner. Si tu prends des œufs au petit-déjeuner, il devra prendre des anti-œufs au petit-déjeuner », explique Latham. Boyle.
Et le temps dans l’anti-univers ?
Selon la proposition de Latham Boyle et de ses collègues, le Big Bang est comme un miroir qui inverse non seulement l’image, mais aussi le sens du temps.
Des deux côtés de l’univers, le temps s’éloigne du Big Bang, mais d’un côté la flèche du temps va vers la droite, et de l’autre elle va vers la gauche.
« Chaque côté de l’univers pense que c’est parfaitement normal. Ils croient tous les deux que leur temps est en train d’avancer. De notre point de vue, dans l’anti-vers, le temps recule, mais pour eux, c’est nous qui allons dans l’autre sens », dit Latham . Boyle.
Cette idée offre une autre possibilité: c’est peut-être nous qui sommes dans l’anti-univers et qui ne le savons pas.
Se pose une autre question : est-il possible de voyager dans cet anti-univers ?
« Nous ne pouvons pas passer de l’autre côté du miroir. Pour cela, il faudrait pouvoir voyager dans le passé. Autrement dit, il faudrait voyager dans l’espace-temps, traverser la singularité du Big Bang et ressortir de l’autre côté« , dit Latham Boyle.
Leur proposition offre un aperçu stimulant de trois concepts fondamentaux de la cosmologie : la matière noire, l’inflation après le Big Bang et les ondes gravitationnelles.
La matière noire est un ingrédient mystérieux qui constitue 25 % de l’univers, mais jusqu’à présent, personne n’a pu observer ce qu’elle est ou de quoi elle est faite. En revanche, elle se remarque par l’influence gravitationnelle qu’elle exerce sur le cosmos.
Au fil des ans, les scientifiques ont proposé plusieurs théories pour expliquer ce qu’est la matière noire, mais personne n’a encore trouvé de réponse convaincante.
Selon quelques-unes des réponses possibles, la matière noire est constituée d’une particule que nous ne connaissons pas encore, c’est-à-dire qu’elle est en dehors du modèle standard.
L’étude de Latham Boyle offre toutefois une réponse « moins coûteuse » à l’énigme de la matière noire.
Le modèle standard décrit les particules fondamentales dont l’univers est constitué. Sa proposition est que pour expliquer la matière noire, il n’est pas nécessaire d’imaginer de nouvelles particules.
Des neutrinos droitiers ?
Une réponse pourrait être de dire que la matière noire est composée de « neutrinos droitiers », une variété de neutrinos, une particule qui fait partie du modèle standard.
L’existence des « neutrinos droitiers » n’a pas encore été prouvée, mais selon Latham Boyle, de nombreux scientifiques s’accordent à dire que ceux-ci pourraient faire partie du modèle standard.
Jusqu’à présent, les neutrinos connus sont « gauchers », en référence à la direction dans laquelle ils tournent . Mais dans un univers symétrique, on s’attendrait à ce qu’un neutrino droit, c’est-à-dire un antineutrino, existe également, écrit l’astrophysicien Paul Sutter, dans un article du portail Live Science, dans lequel il passe en revue l’étude de Latham Boyle.
Ces neutrinos droitiers seraient largement invisibles et ne pourraient être détectés que par la gravité.
« Or, une particule invisible qui inonde l’univers et n’interagit que par le biais de la gravité ressemble beaucoup à la matière noire », explique Latham Sutter.
Le professeur Joseph Formaggio, un physicien qui étudie le rôle des neutrinos en cosmologie, dit trouver intéressante la proposition de Latham Sutter pour expliquer la matière noire.
« J’aime son modèle minimaliste », a déclare à la BBC le Pr Formaggio, qui n’a pas participé à la recherche et qui dirige la division de la physique nucléaire expérimentale et de la physique des particules au Massachusetts Institute of Technology..
« Habituellement, en physique des particules, on peut expliquer beaucoup de phénomènes en introduisant de nouvelles particules, interactions et champs. Il est donc facile de se perdre. Mais cette recherche adopte une approche différente, elle n’apporte rien de plus que ce que nous avons déjà observé », conclut le Pr . Formaggio,
Pas d’inflation, pas d’ondes gravitationnelles ?
Enfin, l’étude remet en question l’existence de l’inflation cosmologique et des ondes gravitationnelles primordiales.
Le modèle de Latham Boyle remet en question l’existence d’une période d’expansion rapide de l’univers après le Big Bang, un concept connu sous le nom d’inflation.
Cette inflation, à son tour, aurait pu créer des ondes gravitationnelles primordiales, qui sont des ondulations se propageant dans le tissu de l’espace-temps, comme les ondulations générées par un caillou jeté dans un lac.
La proposition de Latham Boyle soutient qu’au lieu de l’inflation, la matière de l’univers s’est étendue de manière moins forcée, sans qu’une « époque inflationnaire toire » nécessaire.
Ainsi, selon ce modèle, s’il n’y a pas eu d’inflation, il n’y a pas eu non plus d’ondes gravitationnelles primordiales.
En 2015, des ondes gravitationnelles ont été détectées pour la première fois. Mais Latham Boyle prévient toutefois que celles-ci correspondent à des événements bien plus tardifs que le Big Bang, il ne s’agit donc pas d’ondes gravitationnelles primordiales.
