Pour ceux qui ne le connaissent pas encore, nous empruntons à Wikipedia cette bonne présentation
https://fr.wikipedia.org/wiki/Boualem_Sansal
Boualem Sansal, né le 15 octobre 1949 à Theniet El Had, petit village des monts de l’Ouarsenis, est un écrivain algérien d’expression française, principalement romancier mais aussi essayiste. Censuré en Algérie à cause de sa position très critique envers le pouvoir en place, il publie ses ouvrages dans d’autres pays tels que la France ou l’Allemagne. Il est le lauréat de plusieurs prix littéraires, dont le grand prix du roman de l’Académie française 2015 pour son roman 2084 : la fin du monde.
Le père de Boualem Sansal, Abdelkader Sansal, est issu d’une famille aisée du Rif ayant fui le Maroc pour l’Algérie, et sa mère Khadjidja Benallouche a reçu une éducation et une instruction « à la française »1. Boualem Sansal a une formation d’ingénieur de l’École nationale polytechnique d’Alger ainsi qu’un doctorat d’économie.
Il a été enseignant, consultant, chef d’entreprise et haut fonctionnaire au ministère de l’Industrie algérien. Il est limogé en 2003 pour ses prises de position critiques contre le pouvoir en place particulièrement contre l’arabisation de l’enseignement2.
Son ami Rachid Mimouni (1945-1995) l’encourage à écrire. Boualem Sansal, bien que grand lecteur, ne se vouait pas à l’écriture. Il commence pourtant à écrire en 1997, alors que la guerre civile algérienne bat son plein. Il cherche à entrer dans l’esprit de ses compatriotes, pour tenter de comprendre puis d’expliquer ce qui a mené à l’impasse politique, sociale et économique de son pays, et à la montée de l’islamisme3.
En 1999, il publie son premier roman, Le Serment des barbares, qui reçoit le prix du premier roman et le prix Tropiques. Il y écrit :
« L’Université […], elle enseigne en arabe, ce qui se conçoit, à des étudiants qui ne pratiquent que leur langue et c’est marre
4 : l’algérien, un sabir fait de
tamazight, d’un arabe venu d’ailleurs, d’un
turc médiéval, d’un français XIXe et d’un soupçon d’anglais new-age
5. »
Cet ouvrage connaît un très grand succès de librairie : Boualem Sansal est invité au printemps 2000 au festival du premier roman de Chambéry et, en été, au festival « Les Nuits & les Jours » de Querbes. Depuis, il multiplie les rencontres avec ses lecteurs, en France ou en Allemagne.
Son livre Poste restante, Alger, une lettre ouverte à ses compatriotes, est resté censuré dans son pays. Après la sortie de ce pamphlet, il est menacé et insulté2, mais il décide de rester en Algérie. Il publie Petit éloge de la mémoire, récit épique de l’aventure berbère.
En 2003, Boualem Sansal est rescapé du séisme meurtrier qui a touché sa région à Boumerdès. Après avoir été porté disparu pendant un certain temps, il est retrouvé grâce à un appel lancé par la télévision algérienne.
Son troisième roman, Dis-moi le paradis, publié en France en 2003, est une description de l’Algérie post-coloniale, à travers les portraits de personnages que rencontre le personnage principal, Tarik, lors de son voyage à travers ce pays. Le ton est très critique envers le pouvoir algérien, se moquant de Boumédiène, critiquant ouvertement la corruption à tous les niveaux de l’industrie et de la politique, l’incapacité à gérer le chaos qui a suivi l’indépendance, et attaquant parfois violemment les islamistes. Ce livre est l’une des raisons qui conduisent le pouvoir à limoger l’auteur de son poste au ministère algérien de l’Industrie.
En 2005, s’inspirant de son histoire personnelle, il écrit Harraga6 (harraga signifie « brûleur de route », surnom que l’on donne à ceux qui partent d’Algérie, souvent en radeau dans des conditions dramatiques, pour tenter de passer en Espagne). Pour la première fois, les personnages principaux sont deux femmes : Lamia, médecin pédiatre qui vit dans la misère à Alger, et Cherifa qu’elle recueille alors que cette dernière est enceinte de cinq mois7. Encore une fois, le ton est très critique envers le pouvoir algérien8 : l’argent du pétrole coule à flots, mais l’argent étant accaparé par une minorité de dirigeants, le peuple est dans la misère et les jeunes vont tenter leur chance ailleurs, pendant que ceux qui ne peuvent pas partir restent dans la misère et la peur.
Son roman Le Village de l’Allemand, sorti en janvier 2008, est censuré en Algérie, car il fait le parallèle entre islamisme et nazisme. Le livre raconte l’histoire du SS Hans Schiller, qui fuit en Égypte après la défaite allemande, et se retrouve ensuite à aider l’Armée de libération algérienne, pour finalement devenir un héros de guerre et se retirer dans un petit village perdu9. Le livre s’inspire d’un destin réel, découvert par la presse dans les années 1980.
En mars 2008, il choisit de se rendre au Salon du livre de Paris, malgré la polémique soulevée dans le monde arabe quant au choix d’Israël comme invité d’honneur et l’appel au boycott venant des pays arabes et de certains intellectuels10. Il s’en explique par la formule :
« Je fais de la littérature, pas la guerre », ajoutant : « La littérature n’est pas juive, arabe ou américaine, elle raconte des histoires qui s’adressent à tout le monde
10. »
Ce choix aggrave sa situation en Algérie.
En 2011, il publie un livre très personnel, écrit trois mois après la mort de sa mère11. Ce nouveau roman, Rue Darwin, est l’histoire d’une famille prise dans la guerre d’Algérie et dont le personnage de Yaz ressemble beaucoup à Sansal ; la rue Darwin est une rue où l’auteur a vécu dans son enfance, à cent mètres de la maison d’Albert Camus11.
En février 2012, il fait partie du jury de la Berlinale 2012, sous la présidence de Mike Leigh12 et, en mai de la même année, participe à la troisième édition du Festival international des écrivains à Jérusalem, suscitant de nombreuses critiques dans le monde arabe13,14. Il fait un récit plein d’humour de son voyage15.
En 2018, il participe à l’écriture d’un ouvrage commun, Le Nouvel Antisémitisme en France, sous la direction de Philippe Val, dans lequel il écrit que le gouvernement français participe « au plan de conquête de la planète par la soumission de ses habitants à l’islam », ce que lui reproche Nicolas Lebourg16, chercheur et membre à l’Observatoire des radicalités politiques de la Fondation Jean-Jaurès17.
Il publie une nouvelle fable futuriste et prophétique, Le Train d’Erlingen ou La Métamorphose de Dieu chez Gallimard, réflexion sur les crises migratoires et la montée en puissance de l’islamisme en Europe. Il déclare :
« Oui, l’Europe a peur de l’islamisme, elle est prête à tout lui céder. […] La réalité en boucle n’a pas d’effet sur les gens, en apparence du moins. On l’a vu en Algérie durant la décennie noire : les gens qui, au début, s’émouvaient pour une victime du terrorisme ont fini après quelques mois de carnage par ne ressentir d’émotion que lorsque le nombre des victimes par jour dépassait la centaine, et encore devaient-elles avoir été tuées d’une manière particulièrement horrible. Terrible résultat : plus les islamistes gagnaient de terrain et redoublaient de cruauté, moins les gens réagissaient. L’info tue l’info, l’habitude est un sédatif puissant et la terreur, un paralysant violent
18. »
En 2011, Boualem Sansal habite près d’Alger, dans la ville de Boumerdès11.
Prix littéraires[
- En 1999, il est le lauréat du Prix du premier roman et du Prix des Tropiques pour son roman Le Serment des barbares
- En 2007, il reçoit le prix Édouard-Glissant19, destiné à honorer une œuvre artistique marquante de notre temps selon les valeurs poétiques et politiques du philosophe et écrivain Édouard Glissant.
- En 2008, il est lauréat du grand prix RTL-Lire pour son roman Le Village de l’Allemand.
- Le 9 juin 2011, il remporte le prix de la paix des libraires allemands, pour la manière dont il « critique ouvertement la situation politique et sociale de son pays20. »
- En 2012, il reçoit le prix du roman arabe pour son livre Rue Darwin, avec l’opposition des ambassadeurs arabes qui financent le prix21,22. Il reçoit aussi le prix du roman-news pour ce même roman.
- Le 13 juin 2013, l’Académie française lui décerne le grand prix de la francophonie23. Il reçoit cette même année le prix Jean-Zay pour son essai Gouverner au nom d’Allah.
- Il obtient en 2015 le Grand prix du roman de l’Académie française pour son roman 2084 : la fin du monde publié chez Gallimard. Ce roman de science-fiction crée un monde fondé sur l’amnésie et la soumission à un dieu unique. Inspiré par 1984 d’Orwell, le pouvoir religieux extrémiste a lancé une nouvelle langue, l’abilang : « L’abilang n’était pas une langue de communication comme les autres puisque les mots qui connectaient les gens passaient par le module de la religion. »
- En 2018, il reçoit le prix international de la laïcité de l’association française Comité Laïcité République24.
- Le 23 avril 2022, il reçoit le Prix Méditerranée pour son roman Abraham ou La cinquième Alliance, troisième écrivain algérien à le recevoir après Tahar Djaout et Kamel Daoud, trois écrivains engagés contre les excès du pouvoir algérien ou de l’islamisme25.
- Le 4 juin 2023, il reçoit le prix de la Licra (fédération de Paris) et, le 15 juin 2023, il reçoit le prix Constantinople à Paris pour l’ensemble de son oeuvre.
- Engagements et prises de position
Du 6 au 8 octobre 2012, Boualem Sansal et l’écrivain israélien David Grossman se retrouvent à Strasbourg, avec le soutien du Centre Nord-Sud du Conseil de l’Europe, et lancent « L’appel de Strasbourg pour la paix » dans le cadre du 1er Forum mondial de la démocratie organisé par le Conseil de l’Europe. Près de 200 écrivains venant de cinq continents ont depuis signé cet appel, et se sont déclarés prêts à s’engager pour faire progresser la paix et la démocratie partout dans le monde.
Sansal est connu pour ses propos critiques envers toute forme de religion, et l’islam en particulier :
« La religion me paraît très dangereuse par son côté brutal, totalitaire. L’islam est devenu une loi terrifiante, qui n’édicte que des interdits, bannit le doute, et dont les zélateurs sont de plus en plus violents. Il faudrait qu’il retrouve sa spiritualité, sa force première. Il faut libérer, décoloniser, socialiser l’islam
11. »
Il met régulièrement en garde contre la progression de l’islamisme, particulièrement en France. À la fondation Varenne, le 13 décembre 2016, il déclare :
« [Les Algériens sont] inquiets parce qu’ils constatent jour après jour, mois après mois, année après année, que la France ne sait toujours pas se déterminer par rapport à l’islamisme : est-ce du lard, est-ce du mouton, est-ce de la religion, est-ce de l’hérésie ? Nommer ces choses, elle ne sait pas, c’est un souci. Pendant ce temps, le boa constrictor islamiste a largement eu le temps de bien s’entortiller, il va tout bientôt l’étouffer pour de bon
26. »
Il écrit : « La vérité se tient mieux dans le silence27 » ; ainsi que : « Dieu appartient à qui s’approprie son message28. » Et, dans 2084 : la fin du monde : « La religion fait peut-être aimer Dieu mais rien n’est plus fort qu’elle pour faire détester l’homme et haïr l’humanité. »
Sansal est très critique envers les pouvoirs :
«
Bouteflika est un autocrate de la pire espèce […] C’est pourtant lui que les grandes démocraties occidentales soutiennent et à leur tête la
France de Sarkozy10. » Il ajoute : « Je pense souvent à l’exil mais où, chez Bush, chez Sarkozy ? Remplacer un malheur par un autre n’est pas ce qu’on peut appeler une bonne décision 10. »
Et, dans Dis-moi le paradis, il s’en prend aussi à « la bêtise souveraine » :
« Vinrent les guerres, toutes les guerres, les mouvements de population, les holocaustes, les famines, les déclarations solennelles, les liesses propices aux mensonges, les longues attentes sur le qui-vive, puis les guerres reprirent, les clivages de fer, les vieilles haines ressuscitées, les exils, les exodes, et encore les mots qui blessent, les mots qui tuent, les mots qui nient. Mais toujours, inchangée dans la
guerre ou la
paix de l’entre-deux, marchant en tête, discourant à perte de vue, pontifiante et grossière : la bêtise souveraine
29. »
En décembre 2023, il est signataire de la tribune controversée N’effacez pas Gérard Depardieu visant notamment à défendre la présomption d’innocence de Gérard Depardieu, alors accusé de viol, agression sexuelle et harcèlement sexuel30.
Œuvres
[
Romans
- 1999 : Le Serment des barbares, éd. Gallimard, « Folio » no 3507 – prix du premier roman 1999, prix Tropiques 1999
- 2000 : L’Enfant fou de l’arbre creux, éd. Gallimard, « Folio » no 3641 – prix Michel-Dard
- 2003 : Dis-moi le paradis, éd. Gallimard, coll. « Blanche » (ISBN 978-2-0707-6772-4)
- 2005 : Harraga, éd. Gallimard, « Folio » no 4498
- 2008 : Le Village de l’Allemand ou Le Journal des frères Schiller, éd. Gallimard – grand prix RTL-Lire 2008, grand prix de la francophonie 2008, prix Nessim-Habif (Académie royale de langue et de littérature françaises de Belgique), prix Louis-Guilloux2.
- 2011 : Rue Darwin, éd. Gallimard – prix du Roman-News 201231
- 2015 : 2084 : la fin du monde, éd. Gallimard – Grand prix du roman de l’Académie française 2015
- 2018 : Le Train d’Erlingen ou la Métamorphose de Dieu, éd. Gallimard, 250 pages (ISBN 978-2-07-279-839-9)32,33
- 2020 : Abraham ou La Cinquième alliance, éd. Gallimard, coll. « Blanche ».
- 2024 : Vivre : le compte à rebours, 234 pages, éd. Gallimard (ISBN 978-2-07-304477-8).
Nouvelles
- 2001 : La Voix, Gallimard / Le Monde
- 2004 : La Femme sans nom, Littera et l’Aube
- 2005 : « La Vérité est dans nos amours perdues », dans Des nouvelles d’Algérie, éd Métailié
- 2005 : « Homme simple cherche évènement heureux », Le Monde
- 2005 : « Tous les bonheurs ne valent pas le déplacement », Magazine des Beaux Arts
- 2006 : « La Terrible Nouvelle », Le Monde
- 2008 : « Ma mère » in Ma mère (collectif), Chèvrefeuille étoilée
- 2008 : Rendez-vous à Clichy-sous-Bois : Mohand ou La mort au coin de la rue in Des nouvelles de la banlieue (collectif), Textuel/Ivre d’images
Essais
- 2006 : Poste restante : Alger : lettre de colère et d’espoir à mes compatriotes, éd. Gallimard, « Folio » n° 4702
- 2007 : Petit éloge de la mémoire : quatre mille et une années de nostalgie, éd. Gallimard, « Folio » n° 4486
- 2013 : Gouverner au nom d’Allah : islamisation et soif de pouvoir dans le monde arabe, éd. Gallimard
- 2017 : L’Impossible Paix en Méditerranée, avec Boris Cyrulnik, dialogue animé par José Lenzini, éditions de l’Aube
- 2020 : France-Algérie, résilience et réconciliation en Méditerranée, avec Boris Cyrulnik, dialogue , éditions Odile Jacob, (I
