La DCRI est issue en 2008, de la fusion voulue par Nicolas Sarkozy entre la Direction de la surveillance du territoire (DST) et les Renseignements généraux (RG). Ce rapport de 14 pages résume certaines des recherches de la DCRI et de nombreuses autres directions de la police compétentes en matière de délinquance financière. Il encourage les élus à interroger, si possible dans le cadre d'une commission d'enquête parlementaire, les anciens et actuels patrons ou responsables de la DCRI , notamment celles et ceux qui étaient et sont encore chargés du renseignement économique et financier, ainsi que ses chefs du « département sécurité » ou du « groupe action » de la sous-direction chargée du renseignement économique. Egalement visé est le « service interministériel d'intelligence économique ».
Les auteurs de la note se livrent à un véritable réquisitoire, révélant d'une part la surveillance étroite (et bienvenue) opérée par le renseignement intérieur sur l'organisation de la fraude fiscale internationale, et dénonçant d'autre part la non-transmission à la justice des informations considérables recueillies lors de cette surveillance. Selon La Croix, ces services gardent pour eux les informations recueillies. Ils s'en servent pour augmenter leur pouvoir interne ou, pire, pour aider à neutraliser les informateurs provenant des banques (notamment de la Banque Suisse UBS) qui dénoncent les comportements de leurs clients.
« Ces services se nourrissent des délits qu'ils ne souhaitent pas voir apparaître ou révéler à l'autorité judiciaire pour ne pas amoindrir leur influence, quand le besoin s'en fait sentir. » Or « la presque totalité des cadres de la DCRI et de ces autres services de police ou de renseignement, toujours en responsabilité, sont ceux qui ont servi avec zèle le président de la République précédent ». Résultat, selon eux, « le faible nombre de dénonciations qui émanent des services de renseignement spécialisés dans le domaine économique et financier, notamment ceux de la DCRI, nous incite à réfléchir sur la mission de ces services dont l'inefficacité pénale est injustifiable ».
D'autres services intervenant sur des affaires voisines sont plus discrets. Ceux qui connaissent bien les organes des ministères de l'Economie, des Finances et du Budget ayant à connaître des délits fiscaux et douaniers s'étonnent de voir le faible nombre de dossiers transmis à la justice intéressant les activités délictueuses des contribuables soumis à enquête. Là encore, des fonctionnaires enquêteurs s'indignent quotidiennement (mais en privé) de voir des dossiers importants sur lesquels ils ont travaillé, être « évoqués », c'est-à-dire enterrés, par l'échelon supérieur, au lieu de donner lieu à poursuites.
Mais jusqu'à ce jour, ces fonctionnaires n'ont pas eu le courage, comme leurs collègues de la DCRI auteurs du rapport cité par La Croix, de porter les faits en question à la connaissance de la justice et de la presse. La déontologie du service public le leur interdit, doivent-ils penser. Mauvaise excuse. Pour nous, cette déontologie doit dans les cas graves s'affranchir des pesanteurs de la hiérarchie pour se mettre au service de l'intérêt général.
Tous ces services retrouveraient le sens de leur travail si la lutte contre la fraude fiscale et les paradis fiscaux état, comme beaucoup le demandent maintenant, à gauche comme à droite, érigée en priorité par le Président de la République et présenté par lui, au sein de l'Union européenne, comme une politique commune indispensable au salut de l'Europe
Sur le thème, voir Gabriel Zucman « La seule réponse à l'affaire Cahuzac, s'attaquer aux paradis fiscaux »
http://www.mediapart.fr/journal/economie/050413/gabriel-zucman-la-seule-reponse-laffaire-cahuzac-sattaquer-aux-paradis-fiscaux